Anna Akhmatova
C’est un mot
qui a triomphé de la mort, un nom, celui que Anna Andreïevna Gorenko a
choisi : Akhmatova,
animatrice du
cabaret assiégé par l’histoire, où Hamlet danse avec Tamara sur une Chaconne de
Bach, sous le regard du Greco,
et où il n’y a
que des poivrots et des putains ;
et des femmes
qui attendent inlassablement devant les murs d’une seule porte,
et des hommes
qui passent dans la mémoire du châle qui couvre de ses dentelles la sensualité
de cette Tartare.
Au pays où
frissonnait le bagnard d’Omsk,
elle a tout
compris et fait une croix sur
les illusions
de la subtilité
et la séduction
de l'artifice, ainsi,
le mot qui
n’est pas à moi soudain se montre,
il donne aux
poèmes ensoleillés la formidable et terrible force de la parole prophétique du
poète,
des mots qui ne
pouvaient pas être dits,
les mots que je
n’aurai pas dit
qui prendra
soin de les faire sonner ?
au risque de
les égarer dans les mémoires qu’il faut détruire ;
des mots sans
fin, ceux qui tuent la mort.
Elle n’est pas
morte, Anna aux yeux gris, amie des lecteurs inconnus.
Nous boirons
jusqu’à l’ivresse une amère douleur en écoutant Dimitri Chostakovitch,
quelque part au
milieu des assaillis.
Tous les vers — enfin, beaucoup — accompagnent Mermed, qui lit Anna Akhmatova en anglais : Complete Poetry (Zephyr Press, traduction : Judith Hemschemeyer) et
en français : Requiem… (Poésie
Gallimard, trad. : Jean-Louis Backès). Ici, sont présents des vers de : « Poème
sans héros », « À Tsarskoïe Sielo », « Nous sommes tous des poivrots et
des putes », « The evening sky is gold and vast », « Les élégies du Nord », «
Par le chemin de toute la terre », « Les secrets du métier », « J’ai
l’imagination docile », « Le lecteur », « Le dernier poème ». C'est sa première apparition dans Lichen.
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