J'accompagne en souriant le
soleil qui se lève. Je fais un pas sur le chemin de montagne avant que ne tombe
le brouillard qui égare. Je pourrais être aveuglé par la tâche qui m'incombe.
Je griffe un arbre avec mon couteau que je porte dans ma poche comme un paysan.
J'ai blessé la sève qui le nourrit ; mes doigts en sont salis.
Je me souviens des marques
d'ongles sur le mur en acier des condamnés. Les oiseaux prévenants
m'indiffèrent.
*
Je voudrais évoquer. J'ai trouvé
dans la lumière de l'aube la peur de vivre. Je voudrais dire la douleur avérée
d'un matin. J'ai trouvé, le corps serré, un désir profond d'en finir. J'écris
cette violence inouïe dans l'apaisement de pouvoir la nommer, lui donner un
nom.
La lumière morne du jour, sous
la pluie de saison, arrête en moi le sang de mes veines, la poitrine se serre.
Je suis opaque comme la nuit, je voudrais voir mais ne trouve rien. Le corps
est tenace à ses souffrances. Aucun sursis, aucune porte ne s'ouvre, le temps
ne coule plus. Je suis abandonné sur la berge du monde.
Je pourrais essayer de fuir,
laisser cette douleur se perdre dans une violence, briser la glace. Oui c'est
cela briser, casser, faire un grand bruit qui me ferait oublier par son
intensité d'entendre mon propre écho...
Frappé de mutisme.
Né en 1964, Yann Bachelet vit actuellement à Pau, où il partage son
temps entre peinture et écriture. Présent dans le n° 22 de Lichen.
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